Un imbroglio nébuleux. Des muqueuses cérébrales. La cloche de la damnation. Une fois de plus, Jack n’en pouvait plus de suer dans son lit. Il essayait péniblement de se mettre dans une autre position de réconfort. Rien n’y faisait.
Des quintes de toux prolongées se succédaient aux gémissements déclinatoires. Il se mettait la tête sous l’oreiller. Puis dessus. Puis à même le matelas. Dix minutes lui étaient nécessaires pour décider se mettre sur le dos. C’était encore pire. Comme si cela était encore possible. Un bourdonnement éreintant l’empêchait d’entendre quoi que ce soit. Il distingua juste un vague claquement de portes qui lui paraissait tellement lointain, tellement improbable qu’il en doutait de l’avoir réellement perçu. Machinalement, sa paupière gauche s’ouvrit pour vérifier que son arme de service était toujours sur la table basse du salon. Ouf. Une chose dans sa vie n’avait au moins pas changé de place. Cette constatation lui mit du baume au cœur. Et lui permit de se tirer de ce lit de décadence. Il erra jusqu’à la salle de bains et se mit de l’eau bien fraîche sur son visage. Une délicieuse odeur de parfum poivrée lui faisait frétiller les narines. Mais impossible de savoir pourquoi. Au moment où il plongeait sa tête humide dans une serviette sèche et râpeuse, il sentit une présence derrière lui.
- Tu as passé une bonne nuit, Jack ?
- Bon dieu Lewis, tu m’as foutu la trouille, comment es-tu entré ?
- A ce que j’ai pu croiser dans l’escalier, n’importe qui peut rentrer maintenant. A une époque, celle-là, tu l’aurais même pas regardée.
- Ah c’était ça l’odeur poivrée. J’me disais bien.
- Merde Jack, qu’est-ce qui t’est arrivé ?
- Les gens changent Lewis, les gens changent. Le monde change. Tout change. Sauf tes chemises apparemment.
- Un jour, misérable petit blanc, tu comprendras la puissance colorée de ma garde-robe, je te le dis. En attendant, as-tu appelé Mindy ? Elle est venue au poste la semaine dernière, elle avait l’air perturbée…
Jack sortit une brique de jus d’orange du frigo.
- Laisse cette garce en dehors de tout ça. Pourquoi as-tu fait tout ce chemin jusqu’ici ? Qu’est ce qui a fait bouger ton gros cul de black hein ?
- Pour parler, Jack, pour parler, dit Lewis en lui balançant au nez une culotte rose qu’il avait ramassée sur le canapé.
- Tu peux l’offrir à ta femme si tu veux, répondit Jack en un sourire.
- On s’inquiète en haut lieu. Cette foutue enquête n’avance pas. A part des cadavres, on ne trouve rien. On n’est même pas revenu au point de départ, on ne sait même plus où il est.
- Et ben j’ai un message pour tes huiles de L.A. et de Washington : j’en ai plus rien à branler.
Lewis secoua la tête de dépit. Pendant que Jack était aux toilettes, il regarda les photos épinglées sur le mur au dessus du bureau. Il observait des vieux clichés de son compagnon d’inspecteur avec Mindy pris lors d’un hiver new-yorkais. Que Jack semblait jeune. Mindy, elle, n’avait pas changé. Toujours aussi ravissante, pensa-t-il. A côté, il pouvait apercevoir une photo de son ancienne unité des Bérets Verts, prise dans la jungle amazonienne. Enfin, dans un cadre en bois de fortune, il observa pendant un long moment lui et Jack débouchant une bouteille de champagne, pour fêter l’arrestation de l’Equarrisseur d’Orange County.
- Tu gardais encore le dernier bouton de ta braguette à cette époque, hein Lewis ?
- C’est pas du poids que j’ai pris, c’est des années, marmonna-t-il. J’attends ton rapport pour lundi Jack ?
- Si tu veux Lewis, mais je ne pourrais pas raconter grand-chose. J’ai perdu ma principale piste et sans elle, je ne puis rien faire. Oui Lewis, j’ai complètement paumé la trace de cet indécrottable Gogo !
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